Chronique de Roger Lecocq, Avoka
S’il existe une cohérence concernant le KYC (Know Your Customer) sur le plan mondial, elle réside dans le fait que la réglementation, les coûts de mise en œuvre et de gestion opérationnelle ainsi que les amendes, continuent à augmenter.
Depuis 2012, lorsque plusieurs grandes banques mondiales ont été frappées de lourdes amendes, la réglementation autour du KYC et de la lutte contre le blanchiment d’argent ont fait l’objet d’une attention accrue. Selon le directeur d’Europol, Rob Wainwright, « les banques dépensent 20 milliards de dollars par an pour gérer le programme de conformité« , mais seulement 1% des revenus d’origine criminelle sont saisis chaque année en Europe. Les amendes sont également à la hausse et devraient dépasser 400 milliards de dollars d’ici 2020 en Europe et aux États-Unis.
En quoi consiste le KYC?
Le KYC est le processus par lequel les banques et les institutions financières vérifient l’identité de leurs clients et évaluent les risques potentiels pour établir une relation commerciale avec eux. Le KYC a pour objectif d’empêcher que les banques soient utilisées intentionnellement ou non pour le blanchiment d’argent et d’autres activités illégales. Les processus de KYC incluent la collecte ou le contrôle de :
• Pièces d’identité et informations personnellement identifiables
• Transactions financières en espèces supérieures à 10 000 €
• Particuliers et entités établies dans des juridictions de pays tiers
• Acheminement d’espèces ou d’autres instruments monétaires par-delà les frontières
Le KYC dans l’Union européenne
En 2015, l’Union européenne et le Conseil de l’Union européenne ont adopté l’une des mesures législatives les plus radicales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent : il s’agit de la quatrième directive relative à la lutte contre le blanchiment d’argent (AMLD IV). L’AMLD IV a remplacé les trois directives précédentes et est fortement axée sur les mesures de vigilance à l’égard de la clientèle et la propriété effective. Elle inclut notamment :
• Des descriptions plus spécifiques sur les mécanismes du blanchiment d’argent
• Une augmentation de la vigilance à l’égard de la clientèle, ainsi qu’une simplification des exigences et des conseils en matière de vigilance
• Des exigences détaillées en matière d’identification et une vigilance améliorée pour les bénéficiaires effectifs
• Une obligation de collecter et de conserver les informations concernant le bénéficiaire effectif, ainsi que de les communiquer à un registre central, accessible aux autorités et aux services de renseignement financiers de l’UE.
• Augmentation des procédures de vigilance pour une personne politiquement exposée (personne qui exerce actuellement ou qui a été en charge de hautes fonctions publiques), ainsi que pour les membres de sa famille et ses proches collaborateurs
• Une approche du risque améliorée pour déterminer si le bénéficiaire effectif ou le client est une personne politiquement exposée
• Une diminution du seuil de trésorerie des transactions nécessitant une vigilance améliorée, de 15 000 € à 10 000 €
• Extension à d’autres institutions et personnes impliquées dans l’activité financière, telles que l’ensemble du secteur des jeux de hasard, les professionnels du droit, de la fiscalité et de l’audit, lors de leur participation à des transactions financières.
Il a été demandé aux États membres européens de transposer les nouvelles directives dans leur droit national avant le 26 juin 2017.
Le 9 juillet 2018, la cinquième directive anti-blanchiment (AMLD V) a été approuvée. Cette directive a été proposée à la suite d’attaques terroristes dans l’Union européenne en juillet 2016. Axée sur la propriété effective, la directive anti-blanchiment AMLD V comprend des mesures visant à:
• Augmenter la transparence sur les véritables propriétaires d’entreprises et de trusts
• Rendre publics les registres de propriété effective des personnes morales
• Améliorer l’accès des services de renseignements financiers aux registres bancaires centralisés
• interconnecter les registres nationaux de propriété effective pour faciliter le partage d’informations
• Introduire de nouveaux critères, y compris la transparence concernant la propriété effective, pour évaluer les pays tiers à haut risque
• Inclure dans la liste des pays tiers à haut risque de la Commission européenne tous les pays tiers peu transparents en matière de propriété effective, ceux ne faisant pas l’objet de sanctions ainsi que ceux qui n’échangent pas d’informations
• Appliquer les règles aux entités fournissant des services liés aux devises virtuelles et aux instruments prépayés
Les États membres sont tenus de se conformer à la directive au plus tard le 10 janvier 2020.
Comment les banques de l’Union européenne peuvent-elles construire un programme KYC ?
La création d’un programme KYC repose sur deux composantes principales : le Back Office, qui est le système utilisé en interne par les banques pour gérer le recrutement de nouveaux clients et examiner les documents, et le Front Office, qui est l’expérience obtenue par les clients lorsqu’ils soumettent et vérifient des informations contenues dans l’application, telles que: nom, adresse, lieu de travail, salaire, etc.
Bien que la plupart des banques disposent d’un système de back-office, c’est en fait l’expérience du Front Office qui a le plus d’impact sur l’amélioration et la rationalisation du recrutement des clients. Comme nous l’avons expliqué plus haut, les réglementations récentes ont encore accru la charge qui incombe aux clients de fournir des informations, en particulier sur les bénéficiaires effectifs, ce qui allonge encore le processus d’intégration. Plus le processus de demande est long et fastidieux, plus le risque d’attrition est élevé. Il est donc encore plus important pour les banques de se concentrer sur une bonne expérience d’intégration client.
Le succès d’une grande banque mondiale
Une grande banque mondiale faisait face à plusieurs défis liés à ses processus de mise à jour et de validation des informations KYC concernant l’ensemble de sa clientèle professionnelle. Les commentaires des clients indiquaient qu’ils trouvaient le processus long et fastidieux
Outre le temps requis pour remplir la demande d’informations, les clients devaient fournir les mêmes renseignements à plusieurs reprises, ainsi que répondre à des questions que les banques devaient déjà connaître. Bref, le mécontentement des clients était élevé. De plus, leur processus nécessitait plus d’efforts que dans les banques concurrentes.
La banque constatait également que, à mesure que le coût de la conformité augmentait, certaines catégories de clients devenaient moins rentables sur un plan commercial.
En partenariat avec Avoka, la banque a mené un projet pour optimiser l’expérience client digitale. Les données étaient préremplies pour le client, réduisant ainsi le temps nécessaire pour compléter les informations. De plus, la solution omnicanale d’Avoka permettait aux clients de compléter les informations à partir de n’importe quel périphérique.
Le nouveau processus a amélioré l’efficacité opérationnelle et réduit les coûts de mise en conformité. Aussi bien le temps nécessaire pour étudier un dossier que le coût de l’étude, ont diminué de 30% par rapport à la moyenne précédente.
Publiée le 19 octobre 2018 par JDnet